SYCOMI : Gouvernance Intercommunale du service public de l’eau et de l’assainissement de base en milieu rural
Le Jury International a jugé que l’initiative présentée par le SYCOMI dans le domaine de la « Gouvernance locale » sous la dénomination : « Gouvernance Intercommunale du service public de l’eau et de l’assainissement de base en milieu rural » est un exemple réussi et original d’intercommunalité de service. En effet, le Syndicat a réussi à implémenter un service public de l’eau et de l’assainissement dans toutes les Communes du département du Mbam et Inoubou, à savoir : BAFIA, BOKITO, DEUK, KIKII, KON-YAMBETTA, MAKENÉNÉ, NDIKINIMEKI, NITOUKOU , OMBESSA.
Des problèmes identifiés à la solution trouvée
Un état des lieux effectué en 2005 a permis de constater que seuls 7% des 326 points d’eau couvrant le Département délivraient une eau potable et 20% des villages et hameaux n’étaient pas desservis. Par ailleurs, une multitude d’acteurs intervient, sans coordination préalable, dans le choix des sites et des équipements. De même, 47% des ouvrages étaient en panne du fait de l’absence d’une organisation pérenne pour assurer l’entretien et la réparation des ouvrages. Un autre constat frappant était que 911 habitants utilisaient un point d’eau alors que la norme camerounaise en la matière le fixe à 300. L’une des conséquences majeures était comme il est de coutume dans ce cas un taux de prévalence élevé de maladies hydriques.
Pour remédier à cette situation, les Communes du Département réunies à cette époque en association ont entrepris, avec l’assistance technique de l’Institut Régional de Coopération et de Développement de l’Alsace (IRCOD-ALSACE), de mettre en place un service public intercommunal d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement. La première activité menée pour ce faire, a été de se constituer en Syndicat de Communes.
Avec l’appui d’une école d’ingénieurs camerounaise (Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé ) et d’une autre française (Ecole Nationale du Génie de l’Eau et de l’Environnement de Strasbourg), d’une ONG nationale (ERA Cameroun) et d’un service public de l’eau français (Syndicat des Eaux et de l’Assainissement du Bas Rhin), ainsi que de bailleurs de fonds comme l’Union Européenne, le SYCOMI a pu mener de nombreuses activités qui ont concouru à l’atteinte de ses objectifs. Il s’est agi aussi bien de structurer des Comités d’Usagers de l’Eau et de les former à la gestion des ouvrages, que de former des artisans locaux pour la maintenance, mais aussi de construire de nouveaux points d’eau et des latrines écologiques. Par ailleurs, une importante activité de standardisation a été menée, aussi bien pour le matériel à utiliser (modèles de pompes à utiliser) que pour les procédures (fonctionnement des comités de gestion des ouvrages, utilisation des latrines écologiques, traitement de l’eau potable).
Un dispositif exigeant de suivi de l’activité a été mis en place. Il se traduit par un inventaire régulier du magasin de pièces détachées, la tenue de fiches d’intervention sur les ouvrages défectueux, la production de rapports de suivi des travaux des Comités d’usagers et de rapports des campagnes d’hygiène et d’assainissement.
Des résultats obtenus
Les résultats obtenus par le SYCOMI sont indéniables. En effet, 325 Comités d’usagers sont fonctionnels, parmi lesquels, 40% sont dirigés par des femmes. Ce qui témoigne du caractère participatif et inclusif de l’initiative. Les populations adhèrent si fortement au projet qu’elles paient régulièrement leurs redevances mensuelles (montant collecté passé de 5 millions de FCFA en 2005 à 13,5 millions FCFA en 2015). Tout ceci participant par ailleurs à la durabilité financière du projet.
Au demeurant, le SYCOMI permet à près de 200 000 habitants des zones rurales non desservies par le concessionnaire national d’avoir un accès régulier à une eau potable à travers 450 points d’eau dont la maintenance est assurée grâce aux ressources financières générées par la redevance versée par les usagers.
L’initiative est pionnière au Cameroun et ses résultats sont tels que le Syndicat est régulièrement sollicité pour le partage d’expérience avec les Communes d’autres Départements. Il faut dire que le projet est très bien documenté ce qui en facilite un éventuel transfert.
Pour le Directeur Général du FEICOM, le choix porté par le Jury International sur le SYCOMI donne encore plus de légitimité aux outils de financement de l’organisme. En effet, le FEICOM a créé en 2014 un nouveau produit afin d’encourager les Communes à se mettre ensemble (regroupement de communes ayant une existence légale) dans la réalisation de certains projets d’intérêt commun en leur offrant des conditions de financement plus favorables. 10% du budget d’investissement communal de l’organisme sont consacrés à ce produit.
Commune DSCHANG : Création et gestion participative d’une Agence Municipale de l’Eau et de l’Énergie
La ville de DSCHANG est située dans la Région de l’Ouest du Cameroun. Peuplé de plus 100 000 habitants dont la moitié vie en zone rurale, elle a une superficie de 262 km². Situé à 1400 m d’altitude, Dschang est une ville agricole, touristique et universitaire avec plus de 35 000 étudiants.
Le problème identifié
En 2008, la commune de Dschang a reçu un financement de l’Association Internationale des Maires Francophone (AIMF), de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne et de la ville de Nantes pour l’aménagement de 22 points d’eau, la construction de 11 latrines écologiques à double fosse ventilées dans les établissements scolaires et au marché Tsinfem de Dschang, ainsi que la réalisation des travaux d’assainissement partiel du marché des vivres de la ville. En 2010, dans le cadre du suivi de ce projet, une étude sur l’état des fonctionnements des ouvrages hydrauliques, l’implication et la participation des populations bénéficiaires et le ressenti social sur la question de l’eau a été réalisée par l’Université de Dschang à la demande de l’AIMF et de la Commune de Dschang. Il a ainsi été constaté que :
- les ouvrages construits ne fonctionnait plus ou tombaient régulièrement en panne du fait de malfaçons dans leur construction et/ou d’un déficit d’entretien ;
- les populations bénéficiaires n’étaient pas suffisamment impliquées dans la gestion des ouvrages hydrauliques à telle enseigne que seuls deux (02) comités de gestion communautaires étaient fonctionnels et les ménages ne contribuaient pas financièrement à l’entretien.
- la municipalité ne disposait pas de suffisamment de ressources humaines pour assurer la gestion des ouvrages hydrauliques.
Afin d’assurer la maintenance des ouvrages hydrauliques, d’encadrer les bénéficiaires afin qu’ils contribuent à la pérennité des investissements et de doter la municipalité de ressources humaines en qualité et en quantité, les autorités municipales ont créé en 2011 l’Agence Municipale de l’Eau et de l’Énergie (AMEE), un établissement public communal doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière. En effet, depuis 2007, les communes camerounaises sont maîtres d’ouvrage délégués du secteur public de l’eau.
Les activités menées
Le premier défi relevé par l’Agence a été la mobilisation et la sensibilisation des populations. Il a été question de redynamiser les comités existants, de créer de nouveaux, de former les membres de ces comités et de sensibiliser les populations dans l’ensemble sur la gestion durable de la ressource en eau. La radio communautaire YEMBA joue un rôle essentiel dans cette action en ceci qu’il présente les émissions en langue nationale en direction des populations qui ne parle aucune des langues officielles, le français et l’anglais. Les membres des comités des gestion ont été formés aux notions de participation, d’appropriation et de contribution des populations au service de l’eau. C’est ainsi que les jeunes autochtones vivant dans différentes communautés de la Commune de Dschang ont été sensibilisés aux problématiques liées à la qualité de l’eau dans leur environnement à travers les congrès de village. Dans les statuts des Comités de gestion les postes de trésorier sont réservés aux femmes et un maintenancier sur deux doit être une femme ou un jeune. Une plateforme mensuelle regroupant les comités de gestion de la commune a d’ailleurs été mise sur pied pour assurer le suivi et la programmation des activités. Sont représenté dans la plate-forme, les conseillers municipaux, les chefs traditionnels, les représentants de la société civile et les autorités administratives.
Le second défi de l’Agence a été la mobilisation des ressources financières. Pour se faire, la Commune de Dschang s’est appuyée sur la solidarité internationale. En 2012, la municipalité signe une convention de partenariat avec l’Association des Maires de la Grand’Anse en Haiti, la ville de Nantes en France qui accueille une importante diaspora originaire de la contré, la ville de Kindia en Guinée. En 2014, l’AMEE décroche un financement conjoint de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne et la ville de Nantes pour la construction d’ouvrage d’eau et d’assainissement ». La même année, la municipalité obtient un financement pour la réalisation de 100 lampadaires solaires dans le centre urbain de Dschang auprès du Fonds Spécial d’Equipement et d’Intervention Intercommunale (FEICOM) sur financement de la KFW. En 2016, l’AMEE décroche un financement de l’Union Européenne pour un programme de coopération intercommunale sur la gestion durable de l’eau et de l’assainissement dans cinq communes (Dschang, Fongo-Tongo, Nkong-Zem, Douala 5ème et Kye-Ossi) localisées dans trois régions du Cameroun.
Résultats obtenus
L’AMEE a sensibilisé les populations à la non-utilisation des produits chimiques pour l’agriculture près des zones humides et de captage. La commune encourage l’agriculture biologique, en produisant du compost comme amendement. Il s’est agi notamment de la sécurisation des zones à vocation pastorale et des espaces pastoraux stratégiques (bas-fonds, pistes d’accès aux points d’eau, etc. )
Avec le ressenti des changements climatiques, les thématiques des animations ont évolué. L’assèchement des nappes en saison sèche ont fortement incité l’AMEE, au rationnement de la ressource comme solution directe, en vue de satisfaire le plus efficacement possible les populations. Ensuite, les campagnes d’animation et de sensibilisation ont été menées pour la préservation et la réimplantation des raphias dans les zones humides et de captages, ce qui permet la conservation de la ressource en eau.
De plus, l’AMEE a pris compte dans la réalisation de ses projets la protection de l’environnement et la préservation du climat à travers notamment la mise en œuvre de (03) projets d’Adduction Eau Potable par pompage solaire dans les zones rurales, ainsi que la promotion des équipements à économie d’énergie et des technologies à énergies renouvelables à l’exemple de la petite centrale hydroélectrique de Tchouadeng.
L’extension des réseaux d’adduction d’eau notamment dans la zone urbaine et semi urbaine et la multiplication par dix des recettes de 2015 à 2016 permet à l’Agence de construire des nouveaux points d’eau au bénéfice aux populations les plus défavorisées.
Les résultats obtenus
Réhabilitation des ouvrages non fonctionnels
- 01 Réseau d’AEP (30 m3/h avec un réseau de plus de 3 km) fonctionnel à Tsinbing-Foto ;
- 05 mini réseaux d’AEP fonctionnels avec une production moyenne d’environ 50 m3/h ;
- 5 puits modernes équipés de PMH fonctionnels ;
- 08 forages équipés de PMH fonctionnels ;
- Les délais de réparation des points d’eau ont été réduits ;
Construction de nouveaux ouvrages
- 14 mini réseaux d’AEP fonctionnels ;
- 22 latrines écologiques construites dans les écoles primaires de Dschang ;
- L’existence d’une cartographie des points d’eau existants sur le territoire de la Commune ;
- Disponibilité du rapport d’une étude portant sur la stratégie d’autonomisation de l’AMEE en 2017 (GIE-U.Dsc) ;
- Raccordements de 60 ménages au réseau électriques (Centre de santé de Nkeuli, EP Tchouadeng et le CETIC de Nzinpouet) ;
- 500 ménages particuliers branchés sur nos différents réseaux d’eau potable ;
- Suivi de la mise en œuvre de l’AEP de Tseuh par Fongo Ndeng (PAEPA-MRU par la BAD) ;
Formation et sensibilisations des populations
- 40 comités locaux de gestion des points d’eau potable créés et formés ;
- 80 instituteurs et présidents d’APEE formés aux techniques d’utilisations des latrines écologiques à double fosses ventilées (PADDL-GIZ) ;
- 49 comités d’hygiène et salubrité crées dans les écoles primaires ;
- 100 Points d’eau analysés.
Commune de NGOULEMAKONG :
Promotion de l’économie locale par la valorisation de la filière manioc
La Commune de NGOULMAKONG est située dans la Région du Sud du Cameroun, Département de la MVILA. Elle abrite une communauté d’environ 15 000 âmes qui vit principalement de l’agriculture dont les principales cultures vivrières sont le manioc, le macabo et le bananier plantain. Elle a reçu tour à tour le Prix Régional du Sud et le 3e Prix national de la 2ème édition du Prix National FEICOM pour l’initiative intitulée « Promotion de l’économie locale par la valorisation de la filière manioc ».
Quel était le problème et les solutions apportées ?
A la faveur du diagnostic participatif réalisé en 2003 par l’exécutif communal après sa prise de fonction, NGOULEMAKONG présente une photographie peu reluisante caractérisée par l’insuffisance des services sociaux de base et la pauvreté des ménages, ainsi qu’un tissu économique embryonnaire.
Face à cette situation, le Maire, avec le soutien des populations, a choisi la dynamisation de l’économie locale comme principal cheval de bataille et la promotion de la filière manioc a été retenue eu égard à son fort potentiel de construction sociale. Le principal objectif a été d’accompagner et de fédérer les petites organisations de producteurs en une entité plus forte et surtout plus organisée par la formation des producteurs, l’accès au financement et aux intrants.
Pour mener à bien ce projet, plusieurs acteurs ont été impliqués notamment le Ministère en charge de l’agriculture du Ministère en charge du Commerce, la Banque Mondiale et des associations de producteurs. Toutes ces entités ont ainsi contribué de manière significative à la réussite de ce projet communal ô combien important. Par ailleurs, le Maire a choisi de renforcer au niveau de la Commune un Service d’appui au Développement des Economies Locales (SADEL) dans le but d’apporter un soutien multiforme aux agriculteurs volontaires et ambitieux.
D’autres activités ont consisté en la mise en place et l’accompagnement des organisations de producteurs dans une approche participative. C’est ainsi qu’ont été créées la Maison du Planteur, ainsi que la Caisse Villageoise d’Epargne et de Crédit Autogéré. Bien plus, la Commune de NGOULEMAKONG a accompagné les producteurs de manioc regroupés en GICs dans la création d’une fédération d’union des GICs mutée en Société Coopérative de Promotion du Manioc (SOCOOPROMAN) qui par la suite a reçu un appui dans la mobilisation des ressources en vue de la création d’une unité de transformation et de commercialisation du manioc. Toutes ces activités ont permis d’obtenir des résultats extraordinaires.
Les résultats obtenus
Sur le plan institutionnel, soixante-huit (68) GICs de la filière manioc ont été légalisés ainsi que vingt-trois (23) unions de GICs de cette filière. Ce qui a débouché à la création de la Fédération de l’Union des Femmes Agricultrices de NGOULEMAKONG. L’un des succès les plus éclatants sur ce plan est l’institutionnalisation de la Fête Régionale du Manioc, qui est un véritable rendez-vous des acteurs de la filière et qui vise la promotion, l’exposition et surtout la vente de ce produit et de ses multiples dérivés. D’ailleurs, le Ministère en charge du Commerce alloue désormais à cette Commune un appui financier pour l’organisation de ce grand rassemblement d’agriculteurs.
Sur un autre plan, le lobbying engagé par le Maire auprès de plusieurs bailleurs de fonds a permis de mobiliser des financements auprès du Projet d’Investissement et de Développement des Marchés Agricoles (PIDMA). Cela a permis de mettre sur pied une plantation de manioc d’une superficie de 850 ha qui a par la suite donné lieu à la mise en service d’une Unité de transformation et de commercialisation de cette culture. Tout cela a apporté un impact significatif sur la vie des populations de NGOULMAKONG.
Aujourd’hui, la production du manioc est devenue l’activité la plus pratiquée par les agriculteurs. De la production à la commercialisation en passant par la transformation, c’est dorénavant une filière ouverte et attrayante pour toutes les catégories sociales de la Commune. On assiste au développement de la chaîne des valeurs en ce sens qu’en plus de la production des tubercules (1050 tonnes en 2014), on peut noter la fabrication des bâtons de manioc (11 350 unités en 2012 à 15 131 en 2014), la production de « water fufu » (1860 kg en 2014), celle de gari jaune et blanc (de 1320 kg en 2013 à 1950 kg en 2014).
D’autres activités commerciales ont aussi pu se développer. Cela a permis d’accroître considérablement les espaces commerciaux, l’emploi et les recettes communales. De 28,99 millions FCFA en 2002, les comptes administratifs sont passés à 404,86 millions FCFA en 2014. Bien plus, les recettes fiscales, en nette augmentation, sont passées de 4 518 050 FCFA au 31 décembre 2012 à 29 314 562 FCFA au 31 décembre 2014. L’importante activité menée au niveau du marché de la Commune a permis de relever le montant des droits de place qui sont partis de 61 300 FCFA en 2013 à 627 400 FCFA en 2014. Tout cela a permis d’augmenter les moyens d’action de la Commune.
